Hatchepsout fut la première grande femme dont l’Histoire ait gardé le nom. L’histoire de l’Égypte antique s'étend sur plus de trois millénaires ; mais comme celle des autres civilisations, c’est avant tout une histoire de rois, de grands monarques, de pharaons bâtisseurs ou de conquérants qui mènent leurs armées contre les Assyriens et les Hittites. Bref, une histoire d’hommes.
C’est une constante dans les sociétés patriarcales depuis la révolution néolithique : les femmes ont au mieux une place secondaire, et peu d’entre elles ont l’occasion de marquer l'Histoire.
En Égypte antique, qu’elles soient servantes, tisseuses, nourrices ou princesses royales,
les femmes sont souvent des silhouettes d’arrière-plan, dont l’importance historique est difficile à définir de manière certaine.
C’est précisément la raison d’être de cet article : raviver le souvenir de femmes exceptionnelles, qui ont marqué le destin de l’humanité. Dans toute l’histoire de l’Égypte, la seule femme ayant réussi à se faire couronner pharaon s’appelait Hatchepsout. C'était au 15e siècle avant notre ère, sous la 18e dynastie.
Hatchepsout se distingue, dans l'histoire de l'Égypte Antique, comme l’un des plus grands pharaons. Elle était cependant une femme et est aujourd'hui reconnue comme une des premières femmes ayant compté dans l'histoire et dont les exploits sont connus des historiens. Hatchepsout était le 5ème pharaon de la 18ème dynastie pendant le Nouvel Empire. Les dates de son règne sont encore sources de débat par les historiens mais il semblerait qu'elle eût régné en Égypte pendant vingt-deux années, de 1470 à 1458 avant JC.
Au cours de son règne, Hatchepsout fut couronnée de nombreux succès, notamment lors du rétablissement des relations commerciales qui furent interrompues pendant l'occupation de l'Égypte par les Hyksos. Ce sont ces succès dans les domaines économiques qui l'ont conduit à être reconnue comme un dirigeant triomphant. Les relations commerciales les plus prospères et triomphales furent établies avec le pays de Pount, placé par la majorité des auteurs sur la côté africaine de la Mer Rouge. Cet accomplissement fut immortalisé sur les reliefs de son temple funéraire sur la rive ouest du Nil à Louxor, l'ancienne Thèbes. En résultat des efforts d'Hatchepsout, l'Égypte bénéficia d'une période de prospérité économique pendant et après son règne.
Hatchepsout fut également un prolifique dirigeant bâtisseur. Le nombre de projets de construction entrepris et l'apparition d'un style architectural durant son règne met en évidence la prospérité dont le royaume put jouir à cette époque, tout comme le désir exprimé par la reine-pharaon d'immortaliser son influence en tant que dirigeante de l'Égypte. Elle fit construire des centaines d'édifices à travers la vallée du Nil ainsi qu'un grand nombre de statues à son effigie. De loin, l'édifice le plus célèbre attribué à Hatchepsout est son temple funéraire, connu aussi sous le nom de Deir Al-Bahari ou Temple d'Hatchepsout. Situé en face de Thèbes, à l’ouest du Nil, Deir-el-Bahari, frappe par son aspect architectural moderne et sans précédent.
Le style unique en colonnade de ce temple était encore admiré par les historiens de l'art avant qu'il ne soit rivalisé par l'émergence du style grec classique. Le temple est dédié à Amon, le dieu de Thèbes, à Anubis, dieu des embaumeurs et Hathor, la tête de vache. Mais c'est principalement la Reine qui y est largement représentée, avec la crosse de berger, le fouet et le Ankh, qui symbolise la vie et l'Egypte, sans oublier la barbiche rituelle de pharaon.
À 750 kilomètres au sud du Caire, sur ce qui était alors la rive des vivants, à l’est, se situe la petite ville connue actuellement sous le nom de Louxor. Entre les vestiges de ses temples et ceux de Karnak s‘étendait autrefois la ville de Thèbes, capitale des pharaons du Nouvel Empire, qui viennent alors de secouer le joug des Hyksos. Amon, le protecteur de la cité, est alors en passe de devenir le dieu officiel de tout le royaume. Hatchepsout naît dans un immense et luxueux palais sous le règne d’Aménophis Ier, probablement vers 1495 avant notre ère.
Son père est Thoutmôsis Ier, futur pharaon, et sa mère est l’épouse royale. C’est d’ailleurs elle qui a nommé sa fille Hatchepsout, dont le prénom signifie : « La première des nobles dames ». Un an après, le demi-frère de Hatchepsout, nommé Thoutmôsis naîtra de l’union de son père avec une épouse secondaire. Comme il se doit, Hatchepsout et son demi-frère ont passé les premières années de leur vie dans la ville sacrée de Thèbes. Leur père remarque tout de suite les lacunes intellectuelles de Thoutmôsis.
En revanche, il décèle également les capacités intellectuelles et la vivacité de sa fille, pour lesquelles il n’a qu’une idée : les entretenir et les développer.
Lorsque Hatchepsout atteint 7 ou 8 ans, le pharaon en place, Aménophis Ier, meurt ; comme il n’a pas d’héritier direct, c’est le père de Hatchepsout, Thoutmôsis Ier, qui va coiffer la couronne de haute et basse Égypte. Nous ignorons quel est le lien entre Aménophis Ier et le nouveau pharaon Thoutmôsis Ier. Ce que l’on sait, en revanche, c’est qu’il va devenir un grand pharaon, menant des campagnes très importantes au Levant (la côte est de la Méditerranée), puis en Nubie, au sud de l’Égypte. Il a fait construire toutes sortes de temples, et a fait creuser ce qui sera sûrement la première des tombes de la Vallée des Rois.
Bref, c’est un monarque exceptionnel. Hatchepsout tient très vite son rang grâce à sa solide éducation qui sera encore renforcée par le précepteur royal, qui lui-même, fera d’elle une future épouse de pharaon digne de ce nom.
Peu après, Thoutmôsis s’inquiète de voir l’Égypte tomber entre les mains de son fils. Alors, une idée lui vient à l’esprit: il marie Hatchepsout à son demi-frère, qui est le futur Thoutmosis II.
Ainsi, Hatchepsout acquerra le statut de grande épouse royale et pourra alors conseiller
son mari, et, au besoin, le contrôler.
Par cet habile procédé, Hatchepsout tiendra, dans l’ombre, les rênes de l’Égypte. Bien souvent appelée « épouse du dieu » plutôt qu’épouse royale, Hatchepsout avait sûrement 18 ans au moment du mariage. Elle était d’ailleurs très enthousiaste à l’idée de se lier à Thoutmôsis II.
Hatchepsout était une femme énergique, intelligente et rusée. On ne sait pas si elle se déguisait en homme également en privé, mais les inscriptions officielles continuent à la désigner au féminin. Le mot pharaon étant un terme masculin, c'est un peu comme si l'on disait : "la roi", bizarre, non?
Au cours de son règne, Hatchepsout aura pris de nombreuses décisions, en faisant notamment ériger à Karnak une paire d’obélisques dédiés à Amon. Ainsi, Hatchepsout a fait construire une nécropole royale exceptionnelle, que vous pourrez visiter lors de votre voyage en Égypte.
Ses lignes pures et élégantes se fondent dans un site grandiose. C’était ce que les Égyptiens appelaient « le temple des millions d‘années » : un lieu où se célébraient à la fois le culte royal et le culte divin.
Ce qui restera gravé dans les esprits concernant le règne d’Hatchepsout, ce sont les expéditions extraordinaires qu’elle a entrepris, notamment en Phénicie pour en apporter toutes sortes de richesses, à commencer par du bois, dont le pays manquait cruellement. Ce bois a servi à construire des navires, qui représentaient un moyen de transport nécessaire pour mener de grandes expéditions.
Finalement, de part ses qualités de dirigeante exceptionnelles et ses prouesses révolutionnaires, la reine Hatchepsout a sans aucun doute laissé une très grande empreinte sur l’Egypte antique.